Publicado hoje no blogue francês abaixo identificado, um artigo de opinião acerca de uma decisão do governo espanhol face à intenção de um grupo economico estrangeiro de adquirir o dominio de uma empresa produtora de azeite, lider de mercado.
Made in Spain
"O governo espanhol
desmotivou investidores estrangeiros que
pretendiam assumir o controle da maior
produtora de azeite, Deoleo,
sob o pretexto de que se trata de um
sector estratégico."
Made in Spain
Mis en
ligne le 25.04.2014 à 13:14
Guy
Sorman
Le
gouvernement espagnol a dissuadé des investisseurs étrangers de prendre le
contrôle du premier producteur d’huile d’olive, Deoleo, sous le prétexte qu’il
s’agirait d’une entreprise stratégique autant que symbolique. Est-ce vraiment
un combat qui mérite d’être livré à l’heure où toute économie est mondiale? Il
me semble plutôt que dans cette affaire, on se trompe d’enjeu. Reprenons donc
tout depuis le début.
Le
destin économique des nations se joue sur le marché mondial. Adam
Smith - La richesse des nations - avait pressenti cela dès 1776: il constatait
que les nations qui n'avaient rien à vendre de distinct se condamnaient à
rester pauvres. Deux siècles ont passé avant que cette leçon de base pour
économiste débutant ne soit universellement adoptée. Au temps d'Adam Smith, on
échangeait des oranges tropicales contre des cotonnades de Manchester. En
notre temps, au nom de la loi dite des avantages comparatifs, on échange plutôt
de la main-d'œuvre à bas prix contre de la technologie avancée. Mais cette
interprétation classique de l'échange me semble trop matérialiste, trop
réductrice pour représenter toute la mondialisation contemporaine: sur le marché
s'échangent des produits, mais aussi des rêves. Un rêve en économie se traduit
dans une marque: il est des marques qui séduisent (L'Oréal, Apple) et d'autres
qui rassurent (Boeing, Mercedes). On pourrait indexer la prospérité des
nations sur leur nombre de marques reconnues: chacun, s'il consomme, sait
citer vingt marques américaines, dix allemandes, cinq françaises et zéro russe
ou indienne.
Les
pays aussi sont des marques: un amateur de luxe automobile se
portera spontanément vers le Made in Germany, vers le Made in France pour la
mode, le Made in Japan pour l'esthétique, le Made in USA pour l'avance
technique, le Made in Switzerland pour les montres. Les produits et services
issus de ces pays à marque forte, bénéficient de ce que j'appelle une "valeur
culturelle ajoutée": le consommateur mondial est prêt à les payer
très au-dessus de leur prix de revient parce qu'il acquiert, en sus du produit
et du service, une part de rêve. Certaines nations qui n'eurent jamais de
connotation significative, telle la Corée du Sud, longtemps, ne s'imposèrent
que grâce à leurs prix cassés (ce fut à l'origine le cas du Japon et cela reste
celui de la Chine). Mais une marque nationale peut être créée et promue: la
Corée du Sud y parvient par un marketing habile (inspiré initialement par le
Japon) qui associe les institutions culturelles, le soutien gouvernemental à la
culture et les grandes entreprises privées. Celui qui, il y a dix ans, achetait
un téléphone Samsung parce qu'il était bon marché, le paye plus cher aujourd'hui
- en partie - parce qu'il est coréen. À l'instar de la Corée du Sud, on
pourrait citer le Chili: la marque nationale associant rêve et qualité y a été
délibérément construite. Il existe aussi des cas de marques dormantes.
L'Espagne est un cas exemplaire: sortie de l'autarcie il y a peu - 1986, entrée
dans l'Union européenne - tout le monde situe l'Espagne, mais Made in Spain
évoque des images surannées de flamenco, de tauromachie et de vacances bon
marché. Cette faible valeur ajoutée culturelle - hormis le tourisme - pèse sur
la croissance. Nul consommateur ne sait, par exemple, que l'Espagne est en
quantité le premier producteur d'huile d'olive, de vin, de sacs à main et de
souliers de qualité: à peu près tous ces produits sont exportés vers des pays tiers
comme la France, l'Italie et les États-Unis qui les revendent sous leur propre
marque. L'amateur européen ou américain, et chinois demain, d'huile d'olive ou
de vins fins serait étonné de lire sur l'étiquette de cette huile ou de ce vin,
la mention Made in Spain. Et il n'y attacherait aucun prix. On comprendra que la
marge bénéficiaire la plus substantielle, avec les richesses et emplois qu'elle
induit, va aux marchands de rêves plus qu'aux fabricants de la matière première.
Ce n'est pas le producteur de l'olive qui en profite le plus mais celui qui y
appose sa marque.
Grâce
à ses exportations qui représentent maintenant 34% de la production nationale
contre 24% en 2009, l'Espagne a retrouvé la croissance
(rappelons qu'en dehors des pages du journal ABC, peu de commentateurs
envisageaient en 2009 cette sortie de crise par des méthodes libérales). Mais
la valeur culturelle ajoutée de ces exportations reste faible: combien de
marques espagnoles, un consommateur mondial citerait-il? Certainement, Zara
inventée par l'entreprise Inditex; la banque Santander peut-être.
Les
stratèges en charge des économies nationales devraient emprunter à la
géopolitique les notions de "soft power" et de "hard
power". Par comparaison avec ses grands voisins européens, l'Espagne a,
ces dernières années, renforcé son "hard power" (un meilleur contrôle
des coûts de production en particulier), mais son "soft power" n'a
pas fait l'objet d'une grande politique. L'Espagne offre pourtant un exemple
fameux de création de "soft power » ex nihilo: le musée Guggenheim à
Bilbao. Imaginons un geste de portée équivalente à l'échelle nationale: il
conduirait tout consommateur d'huile d'olive à exiger la marque Made in Spain.
Et pas seulement pour les olives.
http://www.hebdo.ch/les-blogs/sorman-guy-le-futur-cest-tout-de-suite/made-spain
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